Entretien avec Mounira Lourhzal

Dans le cadre de notre dossier sur le cancer et à l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer, Vitavox Institute s’est penché sur le cancer du col de l’utérus et son évolution.

Afin d’enrichir cette réflexion et d’approfondir notre compréhension des dynamiques médiatiques autour de ce sujet complexe, nous avons sollicité l’expertise de Mounira Lourhzal. Elle a récemment consacré un article dans L’Économiste à cette problématique, où elle analyse les défis persistants, notamment en matière de vaccination anti-HPV, de dépistage et des pertes économiques liées aux retards vaccinaux. Nous avons ainsi voulu recueillir son point de vue sur les enjeux clés qu’elle a abordés, afin de nourrir davantage le débat et d’éclairer les actions à mettre en place.

Le manque de sensibilisation du public est l’un des principaux défis. Comment décririez-vous les obstacles rencontrés par les journalistes lorsqu’il s’agit de traiter un sujet aussi complexe que le cancer du col de l’utérus ?

L’enjeu de cet article est justement le manque de sensibilisation du public.  Non seulement le virus HPV prospère aux détriments de la santé publique mais ses conséquences budgétaires pressenties questionnent les politiques publiques. 

Pour cet article, la documentation de l’évolution de la campagne de vaccination a été le principal défi. En l’absence de statistiques ou leur non communication, il s’avère difficile de sortir une information confirmée et fiable. Cependant, la présence de bilan de l’OMS,  d’une société civile ouverte à la communication ainsi que des professionnels de la santé dans le secteur libéral, libres de toute hiérarchie permet d’avoir un regard empirique. Ainsi, il a fallu se déplacer dans le terrain pour tâter le pouls de l’opinion publique, réaliser des sondages de petites échelles -qui ne remplacent pas les données officielles- afin de refléter un tant soi peu l’ampleur du phénomène traité. 

La sensibilisation est faite ainsi in fine de la mission d’information de tout journaliste. 

L’absence de données fiables semble rendre le travail des journalistes encore plus difficile. Vous avez mentionné qu’il a fallu se rendre sur le terrain pour recueillir des données empiriques. Pouvez-vous nous parler de l’importance de cette approche et des défis liés à l’absence de statistiques officielles sur le vaccin ?

À l’exception d’une déclaration officielle basée sur des études employées dans le programme de vaccination anti-HPV, réalisées par la fondation Lalla Salma et le département de communication du ministère de la santé, et qui concluent une adhésion relativement positive, la perception générale des médecins et chercheurs reflète une méconnaissance du public de ce vaccin et d’un certain tabou qui ne saurait être considéré comme un frein sans une véritable campagne. Dans ce sens, l’association Dar Zhor avec son expérience de sensibilisation a confié que menu de bons arguments, on vient à bout des tabous. 

Les freins culturels sont ainsi dépendants des moyens de communication mobilisés mais aussi des leviers législatifs qui n’existent pas encore mais qui ont démontré leur efficacité dans d’autres cas et dans d’autres pays. 

Vous soulignez également l’influence des médias dans la vulgarisation de l’information. Quelle est, selon vous, la responsabilité des médias dans l’accélération de la sensibilisation au vaccin anti-HPV ? Comment une meilleure collaboration avec les institutions publiques pourrait-elle renforcer cet effort, à la fois dans la vulgarisation et dans l’impact concret des campagnes de prévention ?

Je pense que les médias ont une grande influence dans la transmission de l’information de tout genre y compris la vaccination. La vulgarisation est de plus en plus importante dans le discours médiatique avec des médias qui s’adaptent de plus en plus aux formats les plus proches du grand public et les plus adaptés à la grande écoute / ou au plus grand lectorat. 

Le public marocain est de plus en plus à l’écoute d’une information franche, consciencieuse dans laquelle il se reconnaît. 

Quant à la collaboration avec les institutions publiques, les médias sont demandeurs et ne demandent qu’à être informés et répondus à mon humble avis. 

Conclusion

Cet entretien met en lumière la nécessité cruciale d’une communication transparente et adaptée pour sensibiliser le public aux enjeux du cancer du col de l’utérus et du vaccin anti-HPV. Face à des défis tels que le manque de données officielles et les tabous culturels, Mounira Lourhzal insiste sur le rôle indispensable des médias dans la vulgarisation de l’information. La collaboration étroite entre journalistes, institutions publiques et acteurs de la santé apparaît comme la clé pour transformer la prise de conscience en actions concrètes. Ainsi, en combinant rigueur journalistique et engagement citoyen, il devient possible de lever les barrières et de renforcer les campagnes de prévention, afin de mieux protéger la santé publique.

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