
Professionnels de santé : le pari marocain de la rétention et de la répartition
Le mardi 3 juin 2025, lors de la session parlementaire à la Chambre des représentants, le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Amine Tahraoui, a réaffirmé les grandes lignes d’une stratégie nationale de renforcement du système de santé. Répondant à une question écrite du président du groupe Haraki, le ministre a dévoilé une série de mesures censées répondre à l’un des nœuds structurels les plus préoccupants de la santé publique marocaine : la pénurie chronique en ressources humaines médicales.
Ce déficit est le fruit d’un triple déséquilibre :
- Une faible attractivité du secteur public,
- Une émigration massive des professionnels de santé,
- Et une répartition territoriale inégalitaire des infrastructures et compétences.
La situation actuelle est critique : avec un ratio de 17,4 professionnels de santé pour 10 000 habitants (2022), loin des standards de l’OMS, le Maroc ambitionne de passer à 45 pour 10 000 d’ici 2030. Mais cette ambition est-elle à la hauteur des ruptures nécessaires ?
Réformer la formation médicale
- Une diminution du nombre d’années d’études de 7 à 6 ans a été appliqué aux premières promotions dans le but de gagner une promotion par année.
- Amélioration des conditions de la formation des étudiants à travers l’amélioration des technologies mises en place au sein des CHU
- Un changement des conditions d’accès aux différents concours ( d’entrée à la faculté ainsi que celui pour le résidanat ) a aussi été annoncé et déjà mis en place.
- Une augmentation du nombre d’étudiants (on passe de 700 à 1000). Pour ce faire, le ministère de la santé et de la protection sociale mobilise un budget de 3 milliards de dirhams jusqu’en 2030 afin d’assurer ces mesures dans l’ensemble du territoire marocain.
Extension hospitalière : une course contre les inégalités territoriales
- Augmentation du nombre d’hôpitaux dans tout le pays : une construction de plusieurs hôpitaux dans les régions démunies d’infrastructures de santé est prévue à Laâyoune, Béni Mellal etc etc –
- La reconstruction des hôpitaux provinciaux et les hôpitaux des grandes villes comme ça été prévue avec l’hôpital Ibn Sina de Rabat.
- Et l’essor d’initiatives privées comme celles du groupe Akdital ou du CHU de l’Université Internationale de Rabat.
Amélioration des statuts des professionnels de santé
La mesure phare annoncée : l’attribution de l’indice 509 aux médecins du secteur public, soit une revalorisation salariale significative. C’est une première réponse à l’exode des compétences vers des pays offrant :
- Des conditions de travail modernes,
- Une stabilité professionnelle,
- Et un accès à la recherche de pointe.
Mobilité et équité territoriale : un impératif logistique et humain
La stratégie introduit une meilleure répartition géographique des professionnels selon les besoins régionaux. Le séisme d’Al Haouz, révélateur tragique des carences en matière de couverture médicale d’urgence, a renforcé la conscience politique de ce besoin.
Il faudra plus qu’une cartographie des besoins pour enrayer la marginalisation sanitaire des territoires enclavés : des incitations ciblées, des conditions de vie décentes et des mécanismes de fidélisation doivent accompagner la mobilité.
Conclusion
En déployant toutes ces mesures, le Maroc aspire à faire de sa santé publique un réel pilier prioritaire du développement national. Reste désormais à savoir si cette stratégie ambitieuse sur papier, saura réellement répondre aux attentes des professionnels de santé et combler les inégalités persistantes : le Maroc saura-t-il transformer cette stratégie en un véritable levier de souveraineté sanitaire, ou restera-t-elle une réponse conjoncturelle à une crise systémique ?